SIMON BAKER, SELF-MEP-MAN
The Eyes #9
25/03/2019
SIMON BAKER, SELF-MEP-MAN
par Émilie Lemoine
Dessin de Mélanie Roubineau
Ce n’est pas qu’il s’y ennuyait, disons plutôt qu’il avait envie de changer d’horizon.
« Après neuf ans à la Tate Modern, j’ai pensé que c’était le moment pour un nouveau défi ! », explique Simon Baker. L’ancien conservateur en chef du département de photographie
et art international de l’institution londonienne est à la tête de la Maison européenne
de la photographie depuis mai 2018. Un vent de fraîcheur anglaise souffle sur Paris.
Comme à la maison. Fort de son expérience, l’homme bouillonne d’idées pour sa nouvelle maison, car pour lui la photographie « n’est pas une chose cachée, ni un petit trésor dans une boîte, c’est une chose quotidienne ! ». Hors de question donc de cultiver un entre-soi photographique ou un intellectualisme superflu. Comme à Londres, il veut mener avec son équipe une politique de l’ouverture, car il sait l’efficacité d’une volonté collective, d’un élan commun pour rendre le musée accessible, ouvert, généreux, tout simplement accueillant. La clé ? Penser au public, « moins à notre ego de commissaire ». La méthode a fait ses preuves : plus de six millions de visiteurs par an à la Tate. La gratuité y est pour beaucoup. C’est l’une des nombreuses pistes que Simon Baker souhaite explorer à la MEP : pourquoi pas un espace à part et gratuit ?
Sa programmation sera ouverte et plurielle, avec des cartes blanches confiées à des artistes, de jeunes photographes, beaucoup plus de femmes, « parce que c’est l’avenir », et des artistes d’autres pays, d’autres genres : « C’est la réalité de la photographie aujourd’hui et l’on se doit d’en être le reflet ». À cela s’ajoute la collection incroyable dont il hérite. Simon Baker ne cache pas du reste son admiration pour le travail de son prédécesseur, Jean-Luc Monterosso, qui n’a eu de cesse d’étoffer les fonds de la MEP pendant près de vingt-huit ans.
Paris surréaliste. Quand on le questionne sur les origines de sa passion photographique, sa réponse déconcerte autant qu’elle séduit : « Je n’ai jamais été intéressé par la photo ». Ce sont en fait ses recherches sur le surréalisme, dans le cadre de son doctorat, qui lui ont fait découvrir la photographie et acquérir la certitude qu’elle surpassait les autres arts.
Il se souvient de la revue de Georges Bataille, Documents, où il a vu pour la première
fois les fleurs extraordinaires de Karl Blossfeldt. On comprend alors sa joie de vivre à Paris : « Chaque matin, je suis dans la tête d’André Breton : je passe près de l’hôtel des Grands Hommes, puis par la place Maubert, c’est comme être dans les pages de Nadja ! ».
Il faudra attendre mars 2019 pour voir ce que Simon Baker nous réserve à la MEP. Côté européen d’ailleurs, il se réjouit d’une certaine ouverture, avec l’Espagnole Miren Arzalluz au Musée Galliera et l’Allemand Florian Ebner au Centre Georges Pompidou. On en avait besoin. Tout autant que ses paroles réconfortantes, lâchées avec une pointe d’accent londonien : « Paris est aujourd’hui la capitale de la photographie, comme au début du siècle ». Thank you, Simon.
Exposition Saison 1
06.03.2019 – 26.05.2019
LOVE, REN HANG (+2)
Première exposition majeure de l’œuvre de l’artiste chinois Ren Hang depuis sa disparition tragique en 2017, et première présentation personnelle au sein d’une institution parisienne, cette exposition réunit plus de 150 œuvres, issues de collections européennes et chinoises, ainsi que des publications et autres documents inédits.