Greetings from Auschwitz

The Eyes #7

15/11/2018

Greetings from Auschwitz

 

 

Texte de Paweł Szypulski

 

Slavek transmet ses “Meilleures salutations de mon voyage en Pologne à tous mes compagnons de travail.” Et sur la carte postale : le portail d’entrée à Auschwitz II-Birkenau. Selon le cachet de la poste, la carte a été envoyée en 1947, soit deux ans après la libération du camp. C’est l’une des plus anciennes cartes postales reproduites dans le livre de Pavel, Greetings from Auschwitz, mais si vous vous rendez au musée d’Auschwitz demain, vous pourrez encore acheter une carte postale similaire du camp.

Greetings from Auschwitz est un livre issu d’une collection de cartes postales réunie au fil de plusieurs années. Tout a commencé avec une première carte postale trouvée lors d’une vente aux enchères en ligne. C’était une carte postale bon marché et plutôt laide avec une mosaïque d’images typiques les lieux touristiques d’une région au centre de la Pologne : maisonnettes, château, carte des forêts locales… et au milieu de ces lieux parfaitement ordinaires, un monument à la mémoire des victimes des camps d’extermination. Il s’agissait de Treblinka un lieu parmi les plus sombres sur la carte de l’Europe, réduit par l’industrie touristique à une banale attraction locale. Cette image fut le point de départ d’une collection d’une centaine de cartes postales envoyées par des touristes des différents anciens camps de concentration : Treblinka, Majdanek et bien sûr Auschwitz.

En regardant les cartes postales reproduites dans le livre, en passant du temps avec ces objets simples et ordinaires, nous pouvons en apprendre beaucoup sur quelque chose qui peut sembler inattendu de prime abord une amnésie sociale concernant la Shoah. Qu’importe le nombre d’images sur le génocide nazi qui saturent les médias, nombre d’entre nous vivons dans un monde sans Auschwitz, et non dans un monde après Auschwitz comme le pensaient les intellectuels d’après guerre lorsqu’ils se référaient à l’époque. C’est si simple, et pourtant si significatif que certains d’entre nous soyons incapables de voir et de comprendre la réalité d’un camp de la mort au point de pouvoir envoyer des salutations au dos d’une carte postale de chambre à gaz.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, cela devrait d’abord nous faire réfléchir sur nous-mêmes plutôt que de juger les individus en question. C’est peut-être, dans un sens plus profond, notre unique option : nepas savoir est à certain point la seule solution. Dans le cas contraire, si nous étions capables de parcourir la distance qui nous sépare de l’expérience d’Auschwitz, nous ne serions pas en mesure de vivre ensemble normalement en société. Ce mur « d’incompréhension » est quelque chose qui nous permet de fonctionner.

L’un des grands thèmes de l’art concerné par l’Holocauste est le silence. Et la question de savoir ce qui est approprié est aussi cruciale. Les cartes postales pour touristes suggèrent une histoire – bavarde et inappropriée radicalement différente. Une histoire qui pourrait peut-être nous en dire plus, si elle était prise au sérieux, que la sublime esthétique du bel art.


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